LULU GARCIA-NAVARRO, HOST :
Le Japon est confronté à un certain nombre de défis, notamment le vieillissement, la diminution de la population et un faible taux de natalité, le tout entraînant une grave pénurie de travailleurs. Le gouvernement japonais tente de remédier à cette situation en faisant entrer davantage de femmes sur le marché du travail, en offrant plus de congés de maternité et de possibilités de garde d’enfants, et en incitant les pères à prendre également un congé de paternité. Mais comme l’a découvert Anthony Kuhn de NPR, cela a souvent un coût personnel important.
ANTHONY KUHN, BYLINE : Ce père japonais a demandé à ses employeurs de prendre un congé de paternité en 2015.
MR. H : (Par l’intermédiaire d’un interprète) Leur réaction a été, donc votre femme doit travailler ?
KUHN : L’implication était que si elle ne travaillait pas, alors sa femme devait s’occuper de l’enfant parce que la garde des enfants est un travail de femme. L’homme a demandé que nous l’identifiions simplement comme M. H pour le protéger, lui et sa famille, de la discrimination. Il travaille pour l’entreprise japonaise d’articles de sport Asics. Après son congé de paternité, M. H. dit avoir été transféré du département des ressources humaines à un entrepôt. Il dit que la seule explication de son employeur a été la suivante.
MR. H : (Par l’intermédiaire d’un interprète) Nous avons dû chercher un travail que vous pouviez faire.
KUHN : Il pense que son entreprise l’intimidait simplement pour le pousser à démissionner. Il dit que c’est ce que l’on appelle au Japon le pata-hara, ou harcèlement de paternité. Il poursuit Asics en dommages et intérêts, et il obtient de l’aide.
MR. H : (Par l’intermédiaire d’un interprète) Beaucoup de Japonais n’élèvent tout simplement pas la voix. Ils abandonnent tout simplement. Mais il y a un moyen de négocier avec l’aide des syndicats qui ne coûte pas cher.
KUHN : Asics a nié ses allégations, mais M. H n’abandonne pas.
MR. H : (Par interprète) Je veux souligner que nous, en tant que pères, avons le droit d’élever nos enfants.
KUHN : Ce droit est bien protégé, du moins sur le papier. Yoshiaki Wada, un législateur du parti libéral-démocrate au pouvoir, explique qu’en vertu de la loi japonaise, les pères peuvent obtenir un an de congé de paternité ou plus s’ils n’ont pas d’options de garde d’enfants disponibles. Mais…
YOSHIAKI WADA : Même si nous avons l’un des meilleurs systèmes au monde, malgré tout, le pourcentage de congé de paternité est, comme, 6%, alors que le pourcentage de congé de maternité est d’environ 83%.
KUHN : Wada introduit une législation pour changer la culture du lieu de travail au Japon et pour aider le Japon à atteindre son objectif d’avoir 13% des papas qui prennent un congé de paternité d’ici 2020.
WADA : Je voudrais que l’entreprise pousse les travailleurs, informe les travailleurs qu’il y a un système dans l’entreprise pour encourager le congé de paternité. Et si l’environnement le permet, alors le travailleur doit prendre le congé de paternité.
KUHN : Mais Emiko Takeishi, sociologue à l’université Hosei de Tokyo, n’est pas d’accord avec l’idée d’un congé de paternité obligatoire.
EMIKO TAKEISHI : (Par l’intermédiaire d’un interprète) Le congé paternel est un droit, et il devrait être pris par ceux qui le veulent ou qui en ont besoin. Le gouvernement qui en fait un devoir va trop loin.
KUHN : Elle explique qu’à côté du pata-hara, il y a aussi le mata-hara, ou harcèlement maternel. Ce qu’ils ont en commun, c’est que les entreprises punissent les hommes comme les femmes pour les avoir incommodés en prenant des congés pour avoir des enfants. La différence, dit-elle, est la suivante.
TAKEISHI : (Par l’intermédiaire d’un interprète) L’état d’esprit est que les emplois des hommes sont plus importants et impliquent une plus grande responsabilité. Alors comment les hommes peuvent-ils se soustraire à ces emplois pour la tâche moins importante de s’occuper des enfants ?
KUHN : Takeishi dit que c’est l’état d’esprit d’une société dans laquelle la plupart des familles ont un homme comme soutien de famille. Mais cet état d’esprit et ce modèle s’estompent, dit-elle, simplement parce qu’il est plus difficile pour les familles japonaises de survivre avec un seul revenu. C’est peut-être un maigre réconfort pour ceux qui se disent victimes du pata-hara.
Glen Wood est un ancien directeur commercial chez Mitsubishi UFJ Morgan Stanley, une banque d’investissement. Lorsque son fils est né prématurément en 2015, Wood a demandé un congé pour faire face à l’urgence médicale.
GLEN WOOD : À la minute où j’ai mentionné avoir besoin de prendre des congés pour la famille, tout mon monde a changé. Je suis devenu un paria. Je suis devenu l’ennemi.
KUHN : Wood, un Canadien qui travaille au Japon depuis environ 30 ans, dit qu’il a été marginalisé et finalement licencié malgré ses bons résultats au travail.
WOOD : Les attentes pour quelqu’un qui fait mon travail dans l’industrie financière au Japon dans une entreprise japonaise traditionnelle était que je consacre cent pour cent de mon temps et de mon énergie à l’entreprise, et tout ce qui n’est pas cela est considéré comme une trahison.
KUHN : Wood poursuit son entreprise pour récupérer son emploi. Ils nient les accusations de harcèlement. Wood va emmener son fils de 4 ans à sa leçon de violoncelle. Il dit que la musique est l’une des choses qui l’a amené en Asie en premier lieu.
WOOD : Ce fut une vraie joie de – vous savez, d’avoir un fils et de pouvoir lui enseigner la musique et l’amour de la musique.
KUHN : Woods dit que sa bataille pour les droits de paternité ne lui a pas apporté beaucoup de récompenses, mais son jeune fils est clairement une exception.
Anthony Kuhn, NPR News, Tokyo.
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